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Injustice foncière autour du lac de Guiers  et  pièges de la privatisation des terres (Par Djibril Gueye) 

Le texte de Dr Mbaye Cissé leader d’une organisation locale  qui circule dans les réseaux sociaux contient des informations très utiles sur leurs batailles  avec    l’actuelle ministre Yacine Fall et  Mr Aliou Diack, ex maire  de  Mbane  du temps de Wade et de sa fameuse Goana  ,face aux fortes  convoitises des affairistes sénégalais et  étrangers sur le patrimoine foncier de la zone agro-pastorale  du Lac de Guiers et de la commune  Mbane.

Toutefois   ce texte  du docteur en droit comparé contient des erreurs  et des confusions  ainsi que des qualifications juridiques  très contestables  qui montrent que ce juriste ne maîtrise pas bien le droit foncier sénégalais .

Il ya d’abord une confusion sur le statut foncier   du terrain acquis par Tahirou Sarr par adjudication, de la  part de la Banque Bimao,  suite à l’insolvabilité de la société dirigée par Cheikh Hamidou  Kane.

Il commence par parler de titre foncier (TF) de 8000ha puis  de   bail par la suite .

Ensuite ,de facon péremptoire, d’acquisition illegale ,  sans nous dire la disposition juridique qui a été violée.  

Il ya aussi d’autres points mal formulés au plan juridique.

Il apparaît que c’est plutôt  le militant d’une structure de lutte contre l’accaparement des terres rurales qui a écrit un tel texte .

Toutefois ce combat contre la dépossession des paysans de leurs terres agro- pastorales  est légitime et mérite d’être soutenu ,surtout que  les prédateurs fonciers s’entourent de bons avocats pour  profiter des failles du cadre juridique du  régime foncier  et des  complicités au sein du système en vigueur depuis la loi de1964 sur le Domaine National et le Code du Domaine de l’Etat .

Un bail peut bien être résilié par l’Etat  dans certains cas ,qu’il soit emphytéotique ou pas ,sous le contrôle du juge..

Il est bon de savoir  distinguer un simple droit d’usage   sur un terrain obtenu par délibération d’une collectivité territoriale  , du bail  qui est un contrat signé par l’autorité  nationale compétente après avis favorable de la  CNCOD qui  siège à Dakar . 

Après le conflit  foncier de Ndingler  avec le patron de Sodima , avec un bail transformé en titre foncier , donc acquisition du droit de propriété  , le régime sortant  avait limité  au profit des  gouverneurs de  région  et du Secrétariat général du Gouvernement logé à la Primature  ,les pouvoirs des autorités locales  en tenant compte des grandes superficies en  jeu .

Depuis la Nouvelle Politique Agricole des années  90 en période d’ajustement structurel  , les bailleurs dont la Banque Mondiale  poussent à une réforme foncière orientée vers  la privatisation  de terres  au profit de l’ agro-business.

Mais  les différents régimes ont  hésité, car il y a eu fortes  résistances  au niveau des organisations paysannes ,des autorités coutumières et de la société civile foncière regroupée dans le CRAFS. 

Il faut certes une vraie réforme foncière  inclusive  pour mieux valoriser les terres rurales ,mais il  est possible de sécuriser l’occupation foncière sans  privatiser  le patrimoine foncier  sous prétexte de généraliser  la propriété foncière dans le monde rural .

Comme la privatisation est source de nombreux conflits qui mobilisent les communautés revendiquant des droits légitimes  reconnus  au niveau mondial, il est possible, sans  passer par la marchandisation du patrimoine foncier national,de   mettre en place un modèle sécurisé, innovant et mutuellement avantageux  de mise en valeur économique  optimale et équitable  des terres rurales .

Déjà ces bailleurs ont obtenu  une privatisation très contestée  de la gestion de l’eau   et surtout de la gestion des forages ruraux ,après un long processus démarré dans les années 80.

Dans le nouveau contexte  du référentiel de rupture  de L’ Agenda Sénégal 2050 qui parle de Sénégal souverain et juste  , la Banque Mondiale  va t-elle profiter de son nouveau projet ,le Procasef financé avec près de 50 milliards de Fcfa  en 2024 ,pour obtenir enfin  une privatisation déguisée  et une marchandisation de la terre?

Pourtant   la Constitution  dit  clairement   que les ressources  naturelles appartiennent au peuple.                                                      

Djibril Gueye 

Juriste environnementaliste ,expert en foncier ,gouvernance publique  et gestion environnementale . Dakar .Tel 778560716. djibigueye2005@yahoo.fr

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