Ce document de Samir Amin a pour objet de retracer les étapes de la constitution et du développement de la bourgeoisie d’affaires sénégalaise. Il s’agit en effet là d’une bourgeoisie dont l’histoire peut être suivie sur une période particulièrement longue pour l’Afrique noire : plus d’un siècle, ce qui est, sur le continent, exceptionnel. Cette histoire nous apprend d’ailleurs que les autorités coloniales françaises «elles-mêmes» n’ont pas toujours adopté une même attitude à l’égard de la nouvelle bourgeoisie locale, engendrée par l’intégration de la colonie au marché capitaliste international. Jusqu’au début de ce siècle, autorités publiques et maisons coloniales vont promouvoir le développement de commerçants sénégalais, qui, avant la confrérie religieuse des Mourides ont introduit et développé l’arachide dans les campagnes de leur pays. A partir de 1900, le pouvoir colonial va procéder à la liquidation de cette première bourgeoisie périphérique au profit direct des maisons coloniales ou de nouveaux agents subalternes de ces maisons, Libanais et « Petits Blancs ». Depuis 1955, et surtout depuis l’indépendance du Sénégal, on assiste à une reconnaissance très marquée d’un monde des affaires local, dont nous décrirons brièvement les étapes de la croissance avant d’aborder le problème des leçons à tirer de cette histoire, c’est-à-dire avant tout des caractéristiques et des perspectives d’une bourgeoisie du tiers- monde, dont l’apparition et le développement sont greffés sur l’intégration de son pays dans le marché international, c’est-à-dire d’une bourgeoisie périphérique.»
Amin Samir. La bourgeoisie d’affaires sénégalaise. In: L’Homme et la société, N. 12, 1969. Sociologie et tiers-monde. pp.
29-41. http://www.persee.fr/doc/homso_0018-4306_1969_num_12_1_1203
Votre avis